La preuve par Vinted : pourquoi les marques devraient se tenir à l’écart de la seconde main


L’année dernière, après 15 ans d’existence, Vinted est enfin devenu rentable, avec un résultat net de 17,8 millions d’euros pour un chiffre d’affaires de 596 millions, soit à peine 3%. Pourtant, Vinted ne supporte aucun coût lié à la remise en état, au stockage, ni au transport des articles. 


Sa rémunération provient essentiellement d'une commission de 0,70 € + 5 % du prix de vente pour les articles inférieurs à 500 €, avec une commission réduite à 2 % pour ceux dépassant ce seuil.


Ainsi, le modèle économique de Vinted repose sur le plus gros volume de transactions possibles, lesquelles sont directement liées à la taille de la communauté d'utilisateurs (23 millions rien qu'en France). 


Cette dynamique est elle-même dépendante de la capacité de l’entreprise à recruter de nouveaux utilisateurs et à les encourager à vendre davantage. Il n’est donc pas surprenant que les dépenses marketing de l'entreprise atteignent plusieurs dizaines de millions d'euros par an. 


Mais jusqu’à quand pourra-t-elle maintenir cette stratégie de croissance ? Il est probable que Vinted devra augmenter progressivement ses commissions pour compenser l’essoufflement du recrutement de nouveaux utilisateurs.


La fragilité du modèle démontre que les marques de mode ont peu intérêt à s’investir dans la seconde main, du moins sur le plan économique. Voici les principaux risques auxquels elles s'exposent :


1. Complexités et coûts logistiques


La gestion du reconditionnement, des flux logistiques et des stocks de produits d'occasion est complexe et coûteuse. Ces coûts s'appliquent à des articles ayant une marge nettement inférieure à celle des produits neufs. 


Même en externalisant ces processus à un prestataire spécialisé, les gains économiques ne sont pas garantis.


2. Cannibalisation des ventes


Proposer des produits d'occasion peut entraîner une cannibalisation des ventes de produits neufs. En effet, certains clients préféreront opter pour une version d’occasion, ce qui peut réduire les marges globales. 


De plus, gérer la cohabitation des deux offres, avec des stratégies promotionnelles distinctes, peut devenir un casse-tête opérationnel pour les marques.


3. Une cible potentielle faiblement rentable


La seconde main peut permettre d’attirer une clientèle au pouvoir d'achat plus limité mais le faible prix de vente des articles d’occasion et la fragilité du modèle économique pourraient neutraliser tout retour sur investissement. 


Les marques pourraient se retrouver à cibler une clientèle contribuant peu ou pas à la croissance des profits.


4. Maintien de la qualité et de l’image de marque


Les produits d'occasion sont souvent perçus comme moins fiables en termes de qualité, ce qui peut avoir un impact négatif sur l'image de la marque. La gestion des attentes des clients, en matière de services tels que l’échange et le remboursement, devient également plus complexe avec des articles de seconde main.

Sylvain Bronzino  

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