Luxe : chaises musicales sur fond de réinvention nécessaire
Au cours des 20 dernières années, les ventes du marché des biens de luxe ont triplé, passant de 120 milliards d’euros en 2003 à 362 milliards en 2023.
- Deux principaux moteurs de croissance
Cette croissance remarquable repose sur deux principaux facteurs :
- l’expansion vers de nouveaux marchés, notamment la Chine, qui représente à elle seule environ 30 % du chiffre d’affaires du secteur
- une augmentation forte et continue des prix.
Un exemple frappant est celui du sac 2.55 de Chanel. Vendu 1 650 € en 2005, son prix s’élève désormais à 10 300 €, soit une multiplication par un peu plus de six en moins de deux décennies.
- Vers un nouveau souffle
Cependant, un ralentissement des ventes est perceptible dans la plupart des grandes maisons, obligeant les acteurs du secteur à rechercher de nouveaux leviers de croissance.
Si l’Inde est souvent présentée comme un potentiel marché-clé, son développement économique ne semble pas offrir de perspectives solides même à moyen terme.
Concernant la politique de prix, Marco Bizzarri, ancien PDG de Gucci, a récemment admis que le secteur du luxe avait trop augmenté ses prix, ce qui, combiné à une offre de plus en plus standardisée, a freiné l’enthousiasme des consommateurs.
- Retour aux fondamentaux : Le style
Sommes-nous à l’aube d’une prise de conscience ? De nombreuses maisons de luxe réalisent qu’un recentrage sur le style et la qualité pourrait être une stratégie durable pour restaurer la désirabilité.
Ce retour aux fondamentaux permettrait de réaffirmer l’exclusivité sur des bases légitimes, plutôt que de la conditionner uniquement au prix.
Pour illustrer cette volonté de renouveau, l’industrie a récemment vu plusieurs changements à la tête des directions artistiques, un domaine où l’ia ne semble pas avoir encore pris le pouvoir sur l’homme.
Sans être nouveau, ce jeu de chaises musicales a concerné des maisons de premier plan :
- Chanel a nommé Matthieu Blazy après le départ de Virginie Viard, entraînant un remaniement chez Bottega Veneta avec l’arrivée de Louise Trotter, ex Carven
- Michael Rider a remplacé Hedi Slimane chez Céline
- Givenchy a désigné Sarah Burton comme directrice artistique
- Valentino a choisi Alessandro Michele pour succéder à Pierpaolo Piccioli
- Chloé a promu Chemena Kamali, succédant à Gabriela Hearst
- Missoni a nommé Alberto Caliri en remplacement de Filippo Grazioli
- Julian Klausner a pris la direction artistique de Dries Van Noten
- John Galliano a quitté Maison Margiela.
Conclusion
Le marché du luxe, fort d’une croissance spectaculaire, traverse une période de remise en question. Les prix excessifs et la standardisation des offres ont atteint leurs limites, laissant place à une réinvention nécessaire.
Les nouvelles nominations artistiques traduisent une volonté des maisons de se réorienter vers la créativité et la qualité. Ce recentrage pourrait marquer un tournant stratégique, garantissant la pérennité d’un secteur qui aspire à se reconnecter avec ses valeurs fondamentales.
Sylvain Bronzino
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